Ne rien faire. Juste être…

MARIE

 

Malgré le fait que je sois comédienne depuis plus de 10 ans, jusqu’à ce jour, je n’avais jamais abordé le clown.


Me voilà donc partie pour un week-end d’art-thérapie, et ce, sans un sous en poche pour le payer. . (comme par miracle, la somme nécessaire me sera donnée le second jour du stage. Certains appellent cela le hasard…. Le thème du stage: » la peur de gagner ». Tout un programme!. Ça tombait trop bien.

Manuel demande à chacune d’entre nous ce que le thème lui évoquait. c’est formidable de voir dés le début comme l’on se retrouve chez les autres, comme des miroirs se créent. C’était déjà très étonnant d’observer le cheminement du thérapeute. Le premier exercice, être debout avec son nez de clown face aux autres. Ne rien faire. Juste être.
Et Dieu sait si c’est parfois difficile!! Après une longue demi heure de bataille avec moi même, ne sachant plus quoi faire pour que ceux qui me regardaient ne s’ennuient pas. . . j’ai touché le nez mon nez de clown et là, j’ai eu la très nette sensation que ce nez, qui jusque la était en plastique devenait tout à coup vivant. Un nez de chair, animal. Interloquée, j’ai regardé le thérapeute qui m’a simplement dit: le nez est rouge, rouge comme le sang, comme la vie. . . et il a ajouté :tu peux aussi toucher ta tète ce que je fis. Et là, j’ai senti mon corps, l’animalité. . . Alors à la demande de Manuel tout le monde s’est approché pour me toucher et m’aider á prendre conscience de mon corps , Et l’une d’elle de s’écrier; celle-là , on va l’accoucher!. Le lendemain, il s’agissait de traverser la pièce en diagonal et d’explorer 4 émotions: la peur, la joie, la colère et l’envie J’ai commencé par la peur et je dois dire que je me suis surprise, A la fin de la première traversée j’ai senti mon visage déformé par la peur, la terreur. Ensuite je décidais de m’atteler à la joie, sachant que ça n’allait pas être facile pour ne pas dire quasiment impossible. Avec l’aide de Manuel, je découvrais peu à peu que la joie m’avait toujours été interdite enfant Au milieu de la diagonale, j’étais traversée par des fous rire qui se transformaient aussi tôt en sanglots et ainsi de suite et ce pendant un long moment. Manuel me proposa d’explorer la colère avant de revenir á la joie. Ce que je fis. Je me défoulais sans aucune retenue, tapant des pieds, hurlant, etc. en profitant pour revendiquer le droit à la joie!! Puis le thérapeute m’invita de nouveau à explorer la joie, cette fois, j’étais traversée par quelque chose de très doux de très beau qui venait d’ailleurs. Il s’agissait maintenant de vivre l’envie. Très vite, je compris qu’il m’était impossible de me montrer comme « Ça » devant les autres. Je touchais à l’ombre, à quelque chose de l’ordre du péché, quelque chose qui se vivait caché. Manuel me dit d’aller voir du coté de l’animal qui, affamé, cherche sa proie. Je me suis mise à 4 pattes et ai permis à mon animalité de se montrer au grand jour. . A ma grande surprise, je ne fus ni brûlée ni bannie du royaume de Dieu!! Ce qui se jouait à ce moment, était fondamental pour moi. Élevée dans une famille judéo chrétienne. J’avais toujours eu peur de mon ombre. Ma sexualité se vivait cachée. L’énergie sexuelle, la créativité – représentées dans de tarot de Marseille, par le diable étaient des choses auxquelles je n’avais pas accès. Nous fîmes alors un autre exercice fort utile, un combat entre un ange et un démon, le démon devant être le gagnant. Nous gagnâmes à tour de rôle. Le soir même , une grêle hallucinante s’abattait uniquement dans le 18e arrondissement. des grêlons de plus de 4 cm de diamètre transformèrent mon jardin en champs de bataille!! Le lendemain, l’exercice consistait à entrer dans l’espace « perdu », puis dans l’espace « gagné ». J’entrais dans l’espace « perdu ». A ma droite, je pouvais voir des vagues immenses, de plus en plus hautes jusqu’à ce que l’une d’elle se referme sur moi. Je me trouvais donc dans une pièce, une ouverture au plafond à gauche de la salle. Ni chaise, ni meuble pour m’échapper par ce trou là. J’appelais en vain. . . je m’asseyais donc à même le sol, dépitée. . . Manuel me demanda: « Que fais tu? »
« Rien » lui dis je,
« j’attends. »
« Qu’attends tu? »
« J’attends la fin, j’attends de mourir, ça leur fera les pieds! »(le tout en bougeant mes propres pieds!)
« T’entendent-ils? »
« Non, ils ne savent même pas que je suis là »
« Alors à quoi cela te sert il de rester? »
« Ben… « 
« As tu regardé si il y a une autre sortie? »
« Non » « Tu veux bien regarder? »
« Oui ». A ce moment je découvrais que la porte de la pièce était ouverte, grande ouverte. Je pouvais donc aisément quitter les lieux!!
« En as-tu envie? »
« OUI!!! ».
Je sus au même moment que seul celui que j’appellerai mon « diable », pouvait me sortir de là. Que lui seul en aurait la force. Je devais d’abord le « contacter ». Manuel me conseilla de m’aider de mes mains, de toucher mon corps. Je fermai les yeux et me mis à toucher ma tête et subitement, je sentis ce que 33 ans auparavant au moment de ma naissance, j’avais ressenti. Ma tête devait sortir. Je sentais clairement le chemin à parcourir, le sexe de ma mère dont je devais m’extraire. Chose que je fis. . . Je me retrouvais debout, lâchant le cri du nouveau né sous les encouragements de Manuel. J’ouvris les bras et un son d’une infinie délicatesse sortit de ma gorge. J’étais dans l’Univers, le Tout. C’était sublime. Je voulais arrêter là mais Manuel me fit comprendre que je me devais encore de quitter la pièce. Dans la joie, je commençais à me diriger vers la porte. En pleine extase. De mon corps s’élevaient des cris de jouissance. C’était un orgasme spirituel. Je criais, je dansais écartant des voiles que je voyais devant mes yeux. Je passai le pas de la porte criant de joie. La première image que je vis fut le poster d’une déesse bouddhiste dénommée Tara et qui se trouvait dans la pièce à coté. Je pris cela comme un signe de bonne augure. . .
En ce qui concerne, ma peur de l’ombre, je peux maintenant en parler au passé.